Les nuances, le phrasé, l’interprétation. Chronique d’un professeur de piano N° 9.

Nuances

Je remarque souvent un amalgame entre ces trois notions, nuances, phrasé, interprétation . L’idée que respecter les nuances écrites suffira à donner une bonne interprètation est assez répandue. Ce n’est pas si simple…

Les nuances
D’abord, les nuances ne sont pas toujours fidèles au texte original. En prenant plusieurs éditions d’une même oeuvre, on trouvera des différences dans l’écriture des nuances. Les éditeurs prennent souvent des libertés en ajoutant beaucoup trop d’indications.

Ensuite il ne faut pas perdre de vue que jusqu’au XIXe siècle les nuances étaient écrites par rapport aux pianos de l’époque. Le fameux Pleyel pour Chopin, par exemple avait un niveau sonore beaucoup plus faible que nos pianos modernes à mécanique lourde mais il réagissait à la moindre sollicitation de l’interprète. Ces pianos possédaient des différences de timbre entre les registres : des basses cuivrées, un médium chantant, des aigus cristallins, voire aigrelets.

Certains signes sont donc à traduire avec précaution, un crescendo lors d’un trait technique dans l’aigu servait surtout à maintenir un niveau sonore constant, puisque les aigus étaient plus faibles que le reste du clavier. Il est donc inutile de nos jours de trop monter ce crescendo. Les basses pointées, n’ont plus besoin d’être autant accentuées vu qu’elles sonnent énormément sur nos pianos modernes. En ce qui concerne la pédale, la prudence est de mise également puisque le son moderne est déjà beaucoup plus brouillé naturellement.

Il ne faut donc pas prendre les nuances au pied de la lettre et notre système de notation n’est pas suffisamment précis pour transmettre une traduction rigoureuse des intentions du compositeur.