Pochette
Cannes à pochette
Toutes les collections d’instruments de musique possèdent des poches plus ou moins ornées. Ce bibelot est si gracieux par sa forme, si élégant par sa décoration, que la plupart des amateurs de choses rares et curieuses ont tenu à en faire figurer dans leurs vitrines quelque exemplaire de choix. Clapisson en possédait une bien étonnante en ivoire, du modèle d’un très petit violon allongé ; entre les deux tables, on avait ménagé la place d’un éventail. A-t-elle jamais fonctionné ? Pouvait-elle-même rendre un son quelconque ? Je ne sais, mais il est difficile de voir quelque chose de plus joli. Dans le Musée Jubinal on pouvait voir une canne renfermant une pochette. Il fallait alors se partageait dans le sens de la longueur et l’une des parties n’était autre que l’instrument dont la tête plate portait quatre chevilles en fer pour les cordes. Le corps de la pochette était creux ; on en profitait pour y loger un archet minuscule. La leçon terminée, il n’y avait qu’à replacer l’anneau, à revisser la poignée, et le desservant de Terpsichore, sa canne à la main, allait dans une autre maison célébrer son office.
Les pochettes-violons, moins recherchées par les amateurs de curiosité, sont loin d’être dédaignées par les collectionneurs musiciens. Ces petits instruments auxquels des luthiers célèbres ont donné volontiers leurs soins, offrent, en effet, des qualités de forme et de vernis très variées et d’un intérêt réel pour l’histoire de la facture instrumentale. Leurs dimensions, à vrai dire, n’ont rien de bien déterminé ; elles varient de dix à vingt centimètres ; mais détail à remarquer, le manche, terminé par une jolie volute bien fouillée, est diapasonné comme celui des violons ordinaires. L’instrument se compose de deux parties : le fond, dans lequel sont comprises les éclisses et qui ne forme qu’un seul morceau avec elles, et la table d’harmonie ; le manche est taillé dans la même pièce de bois que la table du fond. Les ff, les filets, la touche, le chevalet et les chevilles sont semblables en petit accessoires correspondants du violon dont cette pochette ne se distingue, en somme, que par les dimensions, l’absence d’éclisses rapportées et la structure particulière du manche, qui fait corps avec la table.
Quant à ce qu’on pourrait appeler le style de l’instrument, il n’a rien de déterminé et se rattache, dans ses ondulations, dans son vernis, dans sa coupe générale, tantôt à l’une, tantôt à l’autre des différentes écoles de la lutherie italienne ou allemande.
Nous rappellerons à ce sujet que Stradivarius a signé une magnifique poche se rapprochant par sa forme d’un violon, de modèle allongé ; elle est admirablement soignée dans toutes ses parties. L’instrument porte la date de 1717, la bonne époque des produits du maître crémonais, fut apportée en France par Tarisio à un de ses premiers voyages.
La pochette fut cédée par lui à Silvestre, luthier lyonnais et achetée plus tard par l’auteur de la Fanchonnette. Celui-ci en fut à tel point ravi qu’il lui confia une partie dans son opéra : les Trois Nicolas. Inutile d’ajouter que le morceau était une gavotte ou un menuet, je ne sais plus au juste, et qu’il eut un grand succès, joué par M. Croisilles.
Faisons remarquer à ce sujet que c’est par une erreur qu’on appelle communément la pochette « dessus de violon ». Etant donnée la variété de longueur du corps de l’instrument, il est impossible de lui assigner dans l’échelle instrumentale une place fixe, laquelle est toujours calculée d’après la hauteur de la corde mise en vibration ou de la colonne d’air ébranlée. Jamais la pochette n’avait figuré dans un ensemble instrumental avant que Clapisson ne s’offrit la fantaisie d’en associer la maigre sonorité aux voix de l’orchestre.
Les pochettes-violons de facture ordinaire, qui se vendaient à rien il y a une poussées dans les ventes actuelles jusqu’à un certain prix. Nous avons vu, il y a une vingtaine d’années, des professeurs de danse donner leurs leçons à l’aide de la pochette, et même ce petit violon figurait naguère sur les prix courants de plusieurs fabricants d’instruments. Toutefois, la pochette moderne se distinguait de l’ancienne et par ses dimensions plus larges, et par son manche distinct de la table du fond et par ses éclisses rapportées. C’était simplement un violon en raccourci, sans grande valeur à tous les points de vue.
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