Écouter de la musique peut-il nuire à la créativité ?
Créativité et musique
Il est courant d’affirmer que la musique de fond améliore la créativité. Mais existe-t-il un faisceau de preuves suffisantes pour confirmer cette affirmation ?
Les chercheurs en sciences cognitives indiquent que la créativité implique à la fois une pensée divergente et une pensée convergente.
Une recherche menée en 2017 [1] mettait en évidence que l’écoute d’une musique « joyeuse » pourrait faciliter la créativité. L’écoute de la musique était pour ces chercheurs « utile » pour promouvoir la pensée créative et le lien entre humeur positive et créativité était pour eux probablement le mécanisme sous-jacent.
Cependant une nouvelle recherche [2] vient contester cette conclusion.
Il est utile de préciser que les chercheurs font traditionnellement la distinction entre deux types de pensées créatives, la pensée divergente et la pensée convergente. « La pensée divergente fait référence à une stratégie par laquelle de multiples idées créatives sont produites et évaluées dans un court laps de temps afin de générer des solutions potentielles pour un problème donnée. La pensée convergente permet de relier différentes idées pour trouver une solution unique et correcte à un problème.
Il est également important de noter que la résolution créative de problèmes, qu’elle repose sur une pensée divergente ou convergente, est souvent caractériser par la capacité de percevoir les composantes d’une problématique de manière nouvelle en découvrant des modèles cachés ou en reliant des idées paraissant sans rapport.»
Trois équipes de chercheurs européens ont étudié l’impact de la musique de fond sur la performance cognitive en présentant à un échantillon de personnes des problèmes de compréhension verbale censés explorer leur créativité.
Ces tests de compréhension verbale connus sous le nom de CRAT (Compound Remote Associate Task) sont couramment utilisés dans le champ des neurosciences pour étudier la résolution créative de problèmes basées sur la compréhension. Il s’agit par exemple de montrer à un participant trois mots : robe, cadran, fleur, celui-ci doit trouver un seul mot qui lui est associé. Ce mot est soleil (tenir compte des expressions anglophones, sundress – robe d’été, sundial – cadran solaire et sundflower - tournesol).
Les chercheurs ont utilisé trois expériences impliquant des tâches verbales. Ils ont demandé aux participants de l’étude de résoudre les problèmes dans des environnements différents :
- Environnement silencieux
- Dans un environnement sonore selon trois types de musiques de fond différentes :
- Musique avec paroles étrangères (donc peu familières)
- Musique instrumentale sans parole
- Musique avec des paroles familières
Le Docteur Neil McLatchie de l’Université de Lancaster engagé dans cette étude précise : « Nous avons trouvé de fortes preuves d’altération de la performance cognitive lors de la présence d’une musique de fond par rapport à un environnement calme sur le plan sonore ». Lorsque les participants écoutaient de la musique tout en accomplissant les tâches verbales, leur rendement était « considérablement réduit » par rapport à un environnement calme.
Pour ces chercheurs, il est possible que la musique perturbe la mémoire de travail verbale, altérant par conséquence le traitement cognitif d’un problème.
Concernant la troisième expérience consistant à l’exposition à une musique avec des paroles familières, celle-ci nuit également à la créativité quelle que soit sa capacité à stimuler positivement l’humeur, à être appréciée par les participants ou si les participants étudiaient de manière habituelle en présence de la musique. Ainsi, la créativité est altérée même si le participant ressent une humeur positive après avoir entendu une chanson qu’il connaissait bien.
Les résultats de cette étude remettent en question l’opinion populaire selon laquelle la musique favorise la créativité et démontrent que la musique indépendamment de son contenu sémantique (pas de parole, paroles familières ou non familières) et de son contenu émotionnel (émotion positive) perturbe constamment la performance créative dans la résolution de problèmes de compréhension.
Rédacteur Docteur A. Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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En savoir plus
[1] L'étude de Ritter et Ferguson montrait que l’effet bénéfique de la musique sur l’exécution d’une tâche créative n’était pas relevé lors de l’exposition d’une musique « calme », d'une musique « triste » ou d'une musique « anxieuse », mais se retrouvait lors de l’exposition d’une musique « joyeuse ». Ritter S.M. et Ferguson S. (2017). Happy creativity: Listening to happy music facilitates divergent thinking. PLoS ONE, 12 (e0182210), 1-14.
[2] Emma Threadgold, John E. Marsh, Neil McLatchie, Linden J. Ball. (2019). Background music stints creativity: Evidence from compound remote associate tasks. 02 February 2019 Applied Cognitive Psychology.
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