Comment sont choisis les gagnants aux concours de musique ?
Comment juge-t-on la valeur d'un interprète lors d'un concours musical ?
Juger de la valeur d'un interprète est extrêmement difficile, sur quelles bases s'édifie le jugement d’une performance musicale ? La plupart de nous rapportent que le son est la source d'information la plus importante dans l'évaluation des performances musicales, ce qui paraît tout à fait logique. Une série d'expériences originales vient apporter quelques éléments de réflexion à ce sujet.
Il s'agissait pour des participants volontaires d'identifier le musicien gagnant parmi les trois premiers finalistes de concours internationaux de musique classique et pour cela ils bénéficiaient d’une incitation financière.
La qualité sonore serait estimée comme déterminante ?
La première expérience testait la perception des sujets sur la façon dont les juges d’un jury de concours prennent leurs décisions. Pour désigner les gagnants à ces concours, les participants avaient la possibilité de choisir le type d’enregistrements, vidéo avec le son, bande sonore uniquement, vidéo sans le son. Malgré une décote financière pour ceux qui choisissait la bande sonore sans les images, la plupart des participants choisissaient l’enregistrement sonore seul, indiquant par là qu’ils pensaient que les juges accordaient à la qualité sonore une importance déterminante pour choisir le gagnant d’un concours musical. Les participants montraient qu’ils avaient l’intuition que le son est un canal d’information plus révélateur de la compétence musicale lors de concours internationaux de musique jugée par des experts en musique que des enregistrement à la fois visuels et auditifs.
Juger d’une prestation musicale sur les apparences ?
Bien que les participants à cette précédente expérience aient pensé que les enregistrements audio seuls leur permettraient de mieux correspondre aux décisions des juges, d'autres expériences ont révélé que, d'une manière qui peut paraître paradoxale, ce n’était pas la voie primordiale de désignation du gagnant à ces concours.
Jugement des personnes peu expérimentées en musique
Lorsque les participants ayant peu ou pas d'expérience musicale classique ont reçu des extraits vidéo sans le son et audio sans images des performances des finalistes, bien que 83,3 % des participants aient déclaré que le son était le plus important pour l’évaluation des performances musicales, ces mêmes participants étaient significativement plus susceptibles d’identifier les gagnants lorsqu’on leur présentait uniquement les composantes visuelles des performances (sans le son). En fait, lorsque les participants se sont appuyés sur des enregistrements uniquement sonores, la capacité de choisir le bon gagnant était nettement inférieure au hasard, tandis que les enregistrements vidéo seule ont augmenté leur taux de précision à un niveau nettement supérieur au hasard.
La présentation de vidéo sonorisée ne changeait pas cette constatation. Lorsque les participants novices en musique avaient eu accès aux vidéos sonorisées, ils n’ont pas fait mieux que de choisir un gagnant au hasard.
Jugement des personnes expérimentées en musique
Les musiciens professionnels ont les connaissances et la formation nécessaires pour discerner la qualité d’une prestation par le son. Ils devraient être capables de surpasser les novices pour identifier les véritables gagnants. En utilisant les mêmes séries d’expérience à l’intention de musiciens professionnels recrutés dans des conservatoires de musique, des orchestres symphoniques et des organisations musicales professionnelles, les chercheurs ont fait le constat suivant.
Les musiciens professionnels estimaient comme les novices que le son était le paramètre le plus important pour évaluer une prestation. Pour autant, malgré la formation des musiciens à l'utilisation et à la valorisation du son dans leurs évaluations, seuls 20,5 % des experts ont identifié les gagnants lorsqu'ils ont entendu des versions sonores des enregistrements alors que 46,6 % l'ont fait en regardant des clips vidéos silencieux.
Les personnes ayant reçu des stimuli uniquement vidéos ont obtenu de meilleurs résultats que celles ayant reçu des stimuli uniquement sonores.
Comme pour les novices, lorsque les musiciens professionnels observaient les vidéos sonorisées, leur choix n’était pas supérieur à celui dicté par le hasard.
Ainsi, dans leur jugement pour identifier les gagnants de concours internationaux les experts en musique n’étaient pas significativement différents des novices pour estimer leur performance musicale.
Ces résultats montrent la prééminence de l’information visuelle dans nos jugements, y compris lorsqu'un autre canal informatif, le son en l’occurrence, est de première importance, ce qui est le cas en musique mais aussi dans d’autres situations de la vie quotidienne ou professionnelle.
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