Bases neurologiques du jeu des mains du pianiste
Physiologie des mouvements du pianiste
Jouer d’un instrument avec un clavier est avant tout un phénomène moteur.
Il convient donc au début de cette étude physiologique de rappeler les bases neurologiques des mouvements de préhension. Il ne s’agit pas, ici, de mouvements ayant pour but la « prise » d’un objet, mais de la recherche de « contacts » avec les différentes touches du clavier.
En second lieu, observer un pianiste pendant son interprétation d’une partition ne manque pas de susciter un questionnement multiple.
Neurophysiologie du mouvement pianistique
La décision de jouer fait intervenir le psychisme de l’individu. Le pianiste a l’intention de jouer une partition, c’est le but auquel il va consacrer son temps dans l’immédiat.
L'action de jouer (qui est l’acte moteur) est précédée par une représentation imaginative, centrale) qui va comporter des mouvements organisés et coordonnés des membres supérieurs. Cette représentation est anticipatrice de la mobilisation des doigt.
Le rapprochement des mains et du clavier (correspond au temps de l’approche dans la physiologie de la préhension) va mettre les différents segments des membres dans une posture qui intéresse l’ensemble du corps et qui est nécessaire pour mettre les doigts dans la situation adéquate de départ. Ces mouvements d’approche interviennent à la fois de façon inconsciente grâce à la mise en jeu de réflexes sous-corticaux et médullaires, et aussi, de façon consciente grâce à la vision.
Le contact étant établi entre les doigts et les touches du clavier, la commande motrice va démarrer et c’est alors le cortex cérébral qui prend la direction des événements.
Le cortex moteur primaire obéit, en fait aux influx issus des neurones des aires prémotrices qui sont situées en avant de l’aire motrice principale.
Elles sont au nombre de trois :
- une aire prémotrice dorsale PMd
- une aire prémotrice ventrale PMv
- une aire dorsomédiane ou aire motrice supplémentaire AMS ou SMA
C’est vers ces aires que convergent pratiquement tous les axones provenant de l’ensemble des noyaux associatifs du cerveau et des noyaux gris profonds.
Principalement ces interneurones proviennent du cortex pariétal, dont la partie antérieure reçoit les fibres de la sensibilité somesthésique (voies lemniscales) et aussi les voies de la proprioception consciente ou inconsciente. Elles se projettent sur le thalamus puis sur le lobe frontal.
Ces deux voies sont aussi en connexion avec le cortex visuel et gagnent ensuite les aires prémotrices, qui sont le passage obligé de tous les influx réglant la succession des phénomènes moteurs.
Ceux-ci ont la particularité d’être bien organisés et ce fait est expliqué par la mise en jeu de la mémoire.
La théorie des schémas
C’est la Théorie des schémas qui est généralement retenue : plusieurs « schémas moteurs », déjà vécus et enregistrés peuvent s’assembler pour atteindre le But. Il s’ensuit une coordination. Ce programme peut s’inclure dans un autre plus large et ainsi de suite (phénomène de la récursivité) (Arbib).
Grâce à l’IRMf on a montré que l’action débute dans le cortex préfrontal, gagne le SMA, puis le cortex moteur qui va entraîner le passage à l’acte.
Il est évident qu’alors, va débuter une adaptation, une modulation des gestes. Cela caractérise le jeu du pianiste.
Cette adaptation des mouvements ne semble pas liée à l’existence nouvelle d’afférences proprioceptives, parce que la vitesse du signal nerveux de retour serait trop lente.
On évoque l’existence de « sensations d’innervation » (Lashley) pouvant donner la conscience des mouvements, alors modifiables plus rapidement, mais cette notion n’est pas prouvée.
Par TMS (stimulation magnétique transcranienne) on a constaté que le pianiste, par simple jeu de sa volonté peut modifier l’excitabilité d’une zone limitée de son cortex moteur et donc modifier ses gestes à la demande.
M. Jeannerod soutient le concept d’un « modèle interne » qui va autoriser l’adaptation nécessaire. – Il l’appelle une « Copie d'efférence ». Selon les principes de la cybernétique cette copie offrirait une possibilité de régulation par deux moyens, soit le mode de « feed-back » (mais on a vu la vitesse insuffisante des influx de retour), soit de « feed-forward », qui est un système proactif de contrôle par comparaison immédiate et adaptation très rapide.
Pour créer et diffuser cette copie d’efférence, c’est la zone SMA qui serait importante.
Elle serait associée en complément aux rôles connus de comparateur du cervelet et du cortex pariétal postérieur.
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