Syndrome de surmenage chez le jeune musicien (TMS), les facteurs de risques
Syndrome de surmenage, un trouble multifactoriel
Les troubles musculo-squelettiques sont des affections multifactorielles. On trouve une multiplicité de facteurs, certains sont endogènes et tiennent intrinsèquement au musicien, d’autres sont exogènes. Il existe par ailleurs une grande variabilité du poids relatif de ces facteurs de risques. Ils se conjuguent de manière différente selon les individus et les moments.
Facteurs endogènes
Facteurs génétiques
Les études dans le domaine général, ainsi que dans le champ artistique montrent le rôle joué par les facteurs génétiques. Certaines particularités anatomiques, notamment au niveau des tendons et des muscles de la main et du membre supérieur, peuvent également être des facteurs favorisants.
Antécédents médico-chirurgicaux
Certains problèmes de santé peuvent être des facteurs favorisants, l’hyperlaxité, le diabète, l’hypothyroïdie, certaines pathologies inflammatoires par exemple. Des traumatismes, des interventions chirurgicales peuvent aussi modifier certains paramètres qui vont intervenir sur le plan postural et du geste musical.
Facteurs exogènes
Il s’agit de facteurs partiellement contrôlables et qui sont déterminants pour éviter les troubles musculo-squelettiques.
Facteurs biomécaniques
Répétition (fréquence)
C’est la répétition d’une série de cycles d’actions similaires d’une durée relativement brève (tout au plus quelques minutes). Il est difficile de quantifier et de mesurer la répétitivité. La pratique musicale est faite de patrons de mouvements répétitifs. Sans compter les mouvements du poignet, de l’avant-bras, des épaules, du tronc et ceux pour utiliser les pédales, les doigts du pianistes réalisent de 20 à 30 notes par seconde, ce qui comporte 400 à 600 actions motrices séparées.
Il s’agit du facteur le plus toxique pour l’appareil ostéoarticulaire. Ce facteur est le plus important, même s’il est toujours associé chez le musicien à d’autres facteurs. La pratique du musicien est faite, notamment au niveau des apprentissages et des répétitions, d’actions répétitives. Il s’agit d’un travail musculo-squelettique éprouvant.
Absence de temps de repos
Le temps de repos est celui durant lequel un ou plusieurs groupes musculaires habituellement sollicités dans la pratique en question (le geste musical, dansé, chanté etc.) sont essentiellement inactifs.
L’absence de temps de repos, même lorsque l’action demande peu de force, augmente progressivement l’effort requis pour effectuer les mêmes mouvements répétitifs. Il est nécessaire que le jeune musicien fasse des pauses fréquentes, a minima toutes 45 à 60 min, de 5 à 10 min environ. De manière générale la durée du temps de repos pendant une heure de travail répétitif devra être de l’ordre de 10 à 20 % du temps de la pratique. Ces temps devront être réinterprétés selon les difficultés des exercices musicaux et l’état général au moment de l’exercice du musicien.
Durée
Le temps de pratique sans interruption est un paramètre qui va être un facteur déclenchant et aggravant important. Souvent le jeune musicien a des enjeux, examen de fin d’année, audition, etc. Arrêter complètement est souvent très mal vécu par le musicien. La prise en charge très précoce du trouble est d’autant plus important qu’il va permettre dans bien des cas au musicien de gérer son activité sans arrêter complètement son activité musicale.
Force
La force, l’intensité qui sont exercées lors de la pratique musicale jouent un rôle important dans l’émergence du risque de TMS chez le musicien. L’effort musculaire augmente avec la force, le temps de récupération devra être augmenté d’autant. Pour estimer la force réalisée lors de l’exercice en question, il est nécessaire de prendre en compte d’une part le niveau moyen de la force nécessaire durant tout le cycle, appelée capacité de force maximale ; et d’autre part quels sont les types et le nombre d’actions techniques nécessitant le cas échéant le développement d’une force se situant au-delà des niveaux donnés (force de pointe).
Posture, gestuelle du jeu instrumental
Les amplitudes, les mouvements extrêmes. L’exercice répété, surtout avec intensité, dans certaines positions de la main, du poignet du coude ou d’autres zones articulaires est dangereux pour l’équilibre biomécanique des tissus musculo-squelettiques.
Il existe dans la littérature un clair consensus quant aux dommages potentiels inhérents aux postures et mouvements extrêmes de chaque articulation, depuis les postures prolongés (mêmes celles qui ne sont pas extrêmes), jusqu’aux mouvements spécifiques et hautement répétitifs dans différents segments.
L’analyse des postures et des mouvements est centrée sur chacun des segments du membre supérieur (main, poignet, coude, épaule). L’analyse filmée va permettre de décrire et d’évaluer les contraintes posturales :
- les activités techniques nécessitant des postures ou des mouvements d’un seul segment se situant au-delà du seuil critique d’amplitude angulaire ;
- les autres activités techniques impliquant des postures et/ou des mouvements qui, même s’ils se situent dans une amplitude angulaire acceptable, sont maintenues et répétées de la même façon ;
- la durée exprimée en facteur de temps du cycle de la tâche.
L’ensemble de cette analyse permet une classification du risque et la mise en place de la prévention posturale.
Dans cette oeuvre de Theodor Rombouts, " le concert", le flûtiste adopte une posture inadéquate pour lire la partition, de même pour le joueur de luth. Nul doute que les modèles de Théodor Rombouts qui ont dû tenir la pause de longues heures ont connu des cervicalgies et des tensions du haut du rachis. Les conditions environnementales dans les cabarets devaient également être médiocre, l'éclairement insuffisant. Les partitions devaient être difficilement lisibles et les interprètes devaient se pencher fortement pour lire les partitions. Toutes ces conditions favorisent les troubles musculo-squelettiques des interprètes.
Forme de l’instrument et interfaces
Il s’agit également de paramètres déterminants dans l’émergence d’une tendinopathie. La forme de l’instrument ou de l’interface peut contribuer de manière notable à transformer une posture, un geste et cela sur toute la chaîne musculo-squelettique.
Ces facteurs sont cumulatifs, mais la répétitivité et la durée sont des éléments essentiels à prendre en compte pour évaluer les risques. Il existe dans la majorité des études une corrélation significative entre la répétitivité, la durée de la pratique et l’émergence du risque musculo-squelettique.
Facteurs psycho-sociaux
De nombreuses études aujourd’hui convergent pour intégrer dans les facteurs de risques les paramètres psychosociaux, le stress notamment, les relations parentales et pédagogiques, l’organisation de la pratique et son interpénétration avec les activités globales du jeune musicien. Ces facteurs seront développés dans un prochain article.
Rédacteur. Docteur Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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Revue Médecine des Arts N°95 Santé physique et mentale des musiciens
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