Syndrome de surmenage (tendinite) chez l’enfant musicien
Syndromes douloureux et TMS chez l’enfant instrumentiste
L’enfant musicien, du fait de sa période de croissance, doit s’adapter régulièrement aux modifications morphologiques ; ses rapports à l’instrument s’en trouvent modifiés. Les douleurs de surmenage surviennent fréquemment en relation avec un excès de pratique ou/et une pratique non adapté, une posture déficiente
Question : Douleur après 5 jours de stage de musique
Ma fille pratique le violon depuis deux ans. Elle a 8 ans et se plaint d’une douleur qui irradie son pouce et son poignet droit. Elle vient de participer à un stage de violon et doit jouer cet après-midi en concert. Peut-on avoir des problèmes musculaires ou articulaires si jeune ? Après seulement 5 jours de stage ?
Comment la soulager ?
Monsieur M. B.
Réponse
Les stages, master class, des situations à risque même chez l’enfant
Les stages sont l’occasion pour le musicien quel que soit son âge d’adopter un rythme de jeu différent de ses habitudes. Les heures de pratique se succèdent parfois, les gestes et les postures sont également parfois techniquement modifiés, les répertoires sont différents, l’instrument éventuellement. Lorsque le stage se conclut par un spectacle, les mêmes parties musicales sont répétées jusqu’à ce que le professeur les estiment globalement maîtrisées, du moins en partie ; cette manière de procéder génère une utilisation excessive de certains groupes musculaires, certaines articulations. La dynamique de groupe et la recherche de la performance favorisent les tensions, les crispations, l’effort, qui deviennent également des facteurs de risque non négligeables. Le stress inhérent à des situations nouvelles et de pseudo-compétition majore encore ce risque. Toutes ces conditions sont celles qui génèrent le plus de surmenage musculo-squelettiques. Quel que soit l’âge, l’hyperutilisation musculo-squelettique est susceptible d’entraîner des dommages. Les professeurs doivent se sensibiliser au management du risque musculo-squelettique chez le jeune enfant. C’est pour cela que l’Association Médecine des arts, forment les enseignants afin de limiter ce problème, en les formant à la physiologie du geste, à la posture instrumentale, au repérage de dysfonctions courantes, à la psychologie de la performance et à la prévention. (Diplôme Médecine des arts)
La plupart des syndromes douloureux chez l’enfant instrumentiste est en relation avec des tensions causées par des tensions ligamentaires et musculaires, elles-mêmes causées par l’hyperutilisation et des postures incorrectes.
L’enfant, du fait de sa croissance, doit s’adapter régulièrement aux modifications morphologiques ; ses rapports à l’instrument s’en trouvent modifiés
Que faire en pratique ?
La première chose à faire est le repos musculo-squelettique, et une reprise très (très) progressive du jeu. Dans cet espace de temps, je pense que vous pourriez rencontrer un médecin spécialisé (Médecine des arts®) ou un kiné (Médecine des arts®). S’il n’y en a pas dans votre région, vous pourriez montrer votre petite fille à un rhumatologue ou un chirurgien pour s’assurer du caractère fonctionnel du problème (très probable) et éliminer un autre trouble à ce niveau. Il existe en effet parfois quelques particularités anatomiques au niveau de la main et du membre supérieur qui peuvent être de plus grands générateurs de difficultés notamment chez le violoniste (particularités tendineuses par exemple, syndrome de Linburg, hypermobilité). S’il s’agit de syndrome de surmenage mineur, l’arrêt de l’utiisation y compris du port de cartable ou autres utilisations de ce groupe musculaire quelques jours, devrait suffire. L’utilisation en période sub-aiguë de poches de froid ou d’un traitement anti-inflammatoire local permet le retour rapide à la normale. Dans la mesure où ce n’est pas le cas, le recours à un kinésithérapeute spécialisé (après un diagnostic médical avec d’éventuels examens complémentaires) est justifié, notamment si le parcours dans cette pratique musicale a une visée préprofessionnelle.
Hyperlaxité
L’hyperlaxité articulaire est fréquente chez l’enfant et notamment chez la petite fille. Lorsque le professeur la constate, il doit augmenter sa vigilance. Le travail à l’instrument doit se faire avec une certaine prudence ; la manière dont l’enfant assure ses appuis sur l’instrument, réalise ses notes doit être contrôlée. Du fait de l’hyperlaxité, les amplitudes articulaires physiologiques sont dépassés et entraînent des micro traumatismes. L’hyperlaxité impose souvent un effort supplémentaire pour assurer l’enjeu musical avec la pression sur la touche et la sonorité nécessaire. Pour compenser cette instabilité de position des doigts sur une touche par exemple, on assiste à souvent à une hyperutilisation des muscles pronateurs de l’avant-bras et des muscles de la main afin d’assurer cette stabilité, ce qui va générer des douleurs musculaires et tendineuses de surmenage.
Posture générale
La posture générale de l’enfant à l’instrument, notamment avec une posture asymétrique en relation avec le jeu du violon, demande que le professeur connaisse la posture physiologique à l’instrument. On rencontre souvent un travail avec une forte cambrure, le bassin en avant est accentué par le jeu instrumental. Des compensations multiples peuvent s’établir au cours du temps, et même si cet ensemble postural ne crée pas de problème douloureux au début, le risque à terme est d’engager des schémas moteurs plus stables et vecteurs de troubles futurs. Les compensations se font souvent par une utilisation « non physiologique » de la ceinture scapulaire, avec les épaules en avant et une faiblesse de la fixation des « omoplates ». L’enfant se présente en hyperlordose avec la tête et les épaules en avant. L’effort se reporte alors sur la musculature distale des mains et de l’avant-bras. Cela va aggraver le surmenage musculo-squelettique local. La main et surtout les doigts deviennent dans leur rapport à l’instrument le lieu de la contrainte maximale.
Articulation temporo-mandibulaire
Ne devront pas être sous-estimés également les effets du jeu du violon chez l’enfant dans sa relation avec la face et notamment l’articulation temporo-mandibulaire. La force externe qui s’exprime sous le menton peut prédisposer à des dysfonctions à ce niveau.
Autres troubles médicaux
De même, on peut rencontrer plus volontiers chez l’adolescent violoniste des problèmes dermatologiques éventuels à ce même niveau, le fiddler’s neck du violoniste.
Prévention
Un travail préalable en dehors de l’instrument peut souvent s’avérer nécessaire. L’appui d’un kinésithérapeute spécialisé en Médecine des arts® peut être particulièrement utile. Il pourra avec le professeur, mais sans s’y substituer, conseiller sur le plan du geste musical en fonction de sa physiologie et de la morphologie de l’enfant. Le travail instrumental doit être adapté à la morphologie de l’enfant, aux contraintes contextuelles parfois (périodes de stress, concours etc.). Les pauses doivent être fréquentes et régulières et fonction des difficultés rencontrées.
La musique, une source de développement chez l’enfant
La musique doit rester une source de plaisir et en général c’est le cas. L’apprentissage de la musique et particulièrement du violon est sur le plan psychomoteur un facteur de développement positif certain. Pour autant chacun des acteurs qui intervient dans ce processus éducatif (les parents, les professeurs et les institutions musicales) doit intégrer certaines données préventives pour donner la priorité au bien-être et au développement harmonieux de l’enfant.
Rédacteur Docteur Arcier André, Président fondateur de Médecine des arts®
Médecine des arts® est une marque déposée. Copyright Médecine des arts©
En savoir plus
- Nous ne pouvons que conseiller l’excellent ouvrage Le corps du musicien, manuel de prévention, qui a été fait à l’intention des musiciens, enseignants, parents et élèves. D’une lecture aisée, largement illustrée, cet ouvrage présente de la manière la plus pédagogique les risques liées à la pratique instrumentale et les moyens de prévention pratique.
- N° 29 - Actes du Congrès de Montpellier « L’enfant et la musique »
Médecine des Arts®
715 Chemin du Quart 82000 Montauban (France)
Tél. 33 (0)6 84 14 82 60
E-mail : mda@medecine-des-arts.com
site web : www.medecine-des-arts.com
Médecine des arts® est une marque déposée
Copyright Médecine des arts©
La boutique
Revues
Revue Médecine des Arts N°95 Santé physique et mentale des musiciens
17,00 € Accéder à la boutiqueLa boutique
Revues