Beethoven, intoxication chronique au plomb

Pathobiographie de Beethoven

La pathobiographie est une discipline amusante, tant elle revêt le plus souvent de projections médico-scientifiques très aléatoires, lorsqu’il ne s’agit pas de véritables élucubrations, très inspirées parfois. Plus rarement les recherches reposent sur des démarches purement scientifiques et mettent en perspective de manière raisonnée la vie du musicien et son œuvre, mais finalement cela est relativement rare.

Les maladies de Beethoven

La lecture de ces articles nous apprend néanmoins la culture d’une époque, l’état des connaissances médicales, et nous fait connaître, parfois découvrir par ce biais une œuvre, un artiste et sa pratique. C’est pour cela aussi que nous nous y intéressons. Il s’agit par ailleurs des rares sujets qui intéressent les médias. Il n’est pas un seul interview où le journaliste ne m’ait demandé de raconter les maladies de Beethoven, Mozart, Glenn Gould, Schumann, Ravel, etc. C’est ainsi que tourne la petite musique des journalistes lorsqu’ils veulent s’intéresser à la santé des artistes, parfois ils s’aventurent dans l’arthérapie, prenant à contresens la discipline que nous avons initiée « la médecine des arts ». Mais au final nous pouvons parler de Médecine des arts et des problèmes des artistes, des musiciens, danseurs, chanteurs dans notre actualité, de prévention, de pédagogie, de thérapeutique.

La pathobiographie de Beethoven a fait l’objet de nombreuses publications. On se demande parfois non pas quelles sont les maladies que Beethoven a contractées et qui auraient pu être la cause de ses problèmes auditifs et de sa mort, mais plutôt quelles sont les pathologies qu’il n’aurait pas eues. Nous avions fait un article synthétique sur ce sujet il y a quelques années, La surdité de Beethoven et publié un article du Docteur O’Schea sur ce sujet, Ludwig van Beethoven, les maladies chroniques, la surdité et le décès d’un géant de la musique
Un dernier article analyse la littérature sur le sujet et reprend une des hypothèses déjà formulée depuis près de 15 ans.

Pathobiographie de Beethoven

Beethoven a ressenti les premiers symptômes de ses troubles auditifs, bourdonnement et sifflement d’oreille (acouphènes) à 27 ans. La perte d’audition de Beethoven a été progressive et s’est déroulée sur une période de plusieurs années. En 1801, dans une lettre à un ami, il évoque cette situation si tragique pour un musicien, il n’entendait plus les sons aigus de la voix et des instruments. Ses problèmes auditifs étaient tels qu’à l’âge de 44 ans toute conversation était devenue impossible.Les maladie telles que l’otospongiose ne paraissent pas compatibles avec les résultats de l’autopsie de Beethoven. L’origine auto-immune de la perte auditive peut être également écartée, car les symptômes qui ont été décrits dans ses biographies et les lettres de Beethoven ne cadrent pas avec une maladie intestinale inflammatoire auto-immune. L’absence de mercure dans les échantillons d’os et de cheveux de Beethoven fait que peut être écarté aussi le diagnostic de syphilis qui aurait pu expliquer une surdité secondaire. La syphilis était traitée à cette époque à base d’extraits mercuriels.Par contre des niveaux de plomb élevés découverts lors de cette recherche toxicologique ont été trouvés et suggèrent une exposition répétée sur une longue période de temps, plutôt qu’une exposition plus brève survenue avant le décès de Beethoven. La progressivité de la perte auditive survenue à un âge précoce, les troubles digestifs sont compatibles avec une possible intoxication saturnique (plomb)L’autopsie retrouve un nerf cochléaire rétréci, qui pourrait être compatible avec une dégénérescence axonale due aux métaux lourds tels que le plomb. L’exposition chronique au plomb est susceptible d’entraîner une perte auditive lentement progressive. L’intoxication chronique peut se manifester par une telle atteinte auditive avec une dysautonomie et des signes sensitifs, alors que l’intoxication aiguë retrouve classiquement une neuropathie motrice.Les médecins de Beethoven pensaient qu’il avait une dépendance à l’alcool. Il appréciait particulièrement les vins Hongrois qui, pour les vins médiocres, étaient à cette période fréquemment frelatés et contaminés par du plomb pour améliorer leur goût.

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