La voix soumise à l’image par résonance magnétique (IRM)

« Le fait que nous puissions produire des sons et que nous puissions chanter est tout simplement incroyable pour moi », déclare Aaron Johnson qui étudie à l’Institut Beckman les mécanismes de la voix parlée et chantée.
C’est incroyable et merveilleux, mais si banal que nous n’en avons guère conscience. Nous négligeons le merveilleux si présent en nous et à côté de nous, pour nous intéresser à l’écume des choses.
Ce ne sont pas moins d’une centaine de muscles différents qui entrent en action lors du chant ou de la parole, et de toutes petites pièces de tissus qui en vibrant vont produire les sons. Au niveau microscopique et biomécanique, le phénomène est plus encore splendide et étonnant. Suffisamment étonnant pour que le chercheur et clinicien Aaron Johnson affirme : « c’est un phénomène auquel on peut consacrer sa vie pour l’étudier. »
L’âge est un facteur limitant sur le plan vocal. Le système neuro-musculaire et le larynx changent et s’atrophient avec le vieillissement, ce qui entraîne des modifications dans l’expression de la voix chantée et parlée, une voix plus faible, tendue, soufflée, indique Johnson.
Le maintien d’une qualité vocale malgré l’âge et les vicissitudes de la vie reste un enjeu pour de nombreuses personnes, des professionnels de la voix, les artistes et également les chercheurs.
Les scènes sont à l’image de nos sociétés et les artistes sont de plus en plus nombreux « à vieillir » sur scène. La tournée « Age tendre et têtes de bois » en est une illustration quelque peu commerciale mais bien réelle.

A 92 ans, Juliette Greco chante, elle a toujours « l’envie de la scène ».
« Il y a 65 ans que je chante, c'est une longue vie de travail, il faut savoir s'arrêter avant de ne plus pouvoir. Je ne veux pas partir amoindrie. Et puis je suis une femme... On pardonne à un homme de vieillir, pas à une femme", ajoute-t-elle quand on lui rappelle que Charles Aznavour, de trois ans son aîné, continue à se produire sur scène. » (Le Parisien, 22 avril 2015)
Néanmoins, Juliette Greco sait que sa voix n’est plus la même, mais que le public sera là car il y a dans ces changements suffisamment de persistance, d’invariabilité et d’histoire commune, de souvenirs de toutes ces années passées, que le spectacle vocal sera apprécié dans toute sa dimension humaine.
La scène vous fatigue ?
Non, elle me rend heureuse. Mais je ne voudrais pas que ça devienne un effort. Il y a quelques mois, j'ai réalisé que j'allais avoir 88 ans alors que l'âge, vieillir, ne m'inquiétait pas jusque-là. C'est la première fois que je prenais conscience du temps. (Le Parisien, 16 avril 2015)

Charles Aznavour a 81 ans de carrière (puisque l’artiste avoir débuté à 9 ans), il chante sur scène et fourmille de projets. « Si je ne travaille pas, je meurs » déclare-t-il.
Chantez-vous avec la conscience que c’est peut-être la dernière fois ?
Non, je chante comme dans les années 1950. Je préviens le public que ma voix n’est plus ce qu’elle était, que j’ai un prompteur… Ça fait sourire. La seule chose que je ne fais plus, c’est danser… Mais je cherche à garder une attitude gracieuse. Qu’est-ce qui vous fait encore pleurer ? L’âge ramollit les sensations, je pleure bien plus que dans ma jeunesse... Je peux être sensible à un livre, à un film, à une situation. (Paris match, 12 septembre 2013)