Bi
Instrument de musique
Bi, aérophone de type sifflet
Sifflets font parti des aérophones par souffle. Il s’agit d’une famille d’instrument ou l’air enclos dans une cavité est mis en vibration par un jet d’air buccal ou nasal. Ce groupe est le plus diversifié dans la classe des aérophones chez les Gban. La profusion de ces instruments à vent est certainement due à ce trait culturel fondamental qu’est la chasse, très active (par le passé) das cette zone forestière. Mais ces instruments tombent en désuétude. Dans ce type d’instrument qu’est le sifflet on trouve le Bi, le oupé et le glotin par exemple.
Le sifflet est un instrument formé d’un tube de bois fermé à une extrémité et surmonté d’une partie renflée comportant une embouchure échancrée. Il comporte 3 trous : 2 latéraux près de l’embouchure, le 3e au milieu, en bas du tube. C’est un instrument dont on fait passer l’air par l’embouchure qui le renvoie contre l’arête que comporte l’instrument. Le sifflet est le représentant le plus vaste de cette catégorie, ce qui ne l’empêche point de remplir des rôles multiples. Il est avant tout un instrument de message, utilisé à la chasse, à la guerre ou dans les sociétés secrètes. Son propriétaire l’emporte généralement pendu au cou, de sorte que l’objet est pourvu d’un mode de suspension. Selon S. Chauvet, citant H. Labouret, « il est probable qu’en Afrique occidentale la transmission par sifflets a précédé celle par tambours et que cette dernière n’a fait que s’adapter, pour traduire la signalisation, sifflée préexistante ». Selon le même auteur, les néolithiques du Glozel avaient employé, pour le même usage, des os de rennes (phalanges ou os du tarse) dans lesquels ils avaient creusé des trous ne les traversant pas complètement. Chez les Gban, le sifflet est un instrument de chasse. Ils s’en servent lors de leurs expéditions de chasse collective dans la forêt. Ils connaissent tout un répertoire d’appels et de signaux conventionnels pour diriger les mouvements de la ligne souvent dispersés des rabatteurs, et notamment la manœuvre d’encerclement. On affirme que même les chiens dressés pour la chasse comprennent ce langage sifflé. Le chasseur en sortait aussi un seul ton pour appeler ses chiens égarés pendant la chasse. Selon nos informateurs, le sifflet en bois prend le nom de bi lorsqu’il est fabriqué dans un arbre portant le même nom bi et joué par un homme. Il devient oupé lorsqu’il est joué par les femmes lors des funérailles. Cependant, nous avons remarqué des sifflets appelés bi faits dans du bambou. Le sifflet gbotin présente quant à lui une forme un peu différente des deux autres : relativement plus grand que les sifflets bi ou oupé, le sifflet gbotin est généralement taillé dans du bois d’iroko diè (Chlorophora excelsa). Il mesure environ 20 cm de longueur et 4 cm de diamètre pour l’embouchure. L’extrémité supérieure de cet instrument est partiellement bloquée, de sorte que le souffle du joueur, passant par un étroit conduit, est dirigé sur le rebord biseauté d’un orifice ou « lumière » ménagé dans le tuyau. Cette conception du gbotin permet à l’instrument d’émettre deux sons au plus. Le sifflet gbotin est toujours joué par triplette (soliste, basse, accompagnement). Les trois instruments sont reliés entre eux par une ficelle passant dans des orifices pratiqués dans leurs parties amincies. Les dimensions relevées sur deux sifflets bi dans le village de Lahouda sont :
• le petit bi (taillé dans du bois) : 8 cm (longueur) ;
• le grand bi (taillé dans du bambou) : 14 cm (longueur).
En pays gban, le mot bi est le terme utilisé pour désigner généralement tous les instruments à air ou à vent.
Comme nous l’avons dit plus haut, l’appellation bi s’applique aussi aux trompes traversières en cornes d’animaux. Pour la fabrication de ces trompes, les Gban ont utilisé comme matière première les cornes torsadées et curvilignes de certains bovidés. Il s’agit des ornements frontaux de buffle zouè ou douè, de gazelle zo (de nos jours on en trouve en cornes de bœuf dodo ou doro) dont on a coupé la pointe pour obtenir un trou qui peut être bouché avec le pouce ou libéré, ce qui permet de varier la hauteur du son. Il est possible ainsi de transmettre différents messages sonores. À quelques centimètres de la pointe, on pratique un trou qui sert d’embouchure latérale par laquelle le joueur insuffle l’air dans l’instrument. La forme de cette embouchure peut être carrée, rectangulaire, ovale ou en losange. Ces instruments, de forme conique et sans trou d’intonation, servent pour la danse, les funérailles d’un personnage important et pour les réjouissances. En position de jeu, elles sont tenues en travers, à peu près horizontalement (d’où l’appellation de trompes traversières), le pavillon dirigé généralement à gauche du musicien qui tient sa main droite tout près du trou de modulation. La colonne d’air est mise en vibration par la pression des lèvres du joueur. Dans son étude sur ce peuple, B. Holas relève que les artisans locaux fabriquaient des olifants (trompes en ivoire) zôèman. Mais en raison de la rareté de l’éléphant (en voie de disparition), les trompes en ivoire ont totalement disparu du pays gban. Déjà en 1923, lors de son passage dans la région d’Oumé, L. Tauxier signalait la rareté de ces trompes en ivoire (qu’il appelait man) qui, selon lui, avaient une fonction communicative. Voici les dimensions relevées sur deux trompes bi à Tiégba :
• bi (en corne de gazelle) : 20 cm (longueur), 3 cm (diamètre du pavillon), 1 cm (diamètre de l’embouchure),
• bi (en corne d’antilope) : 37 cm (longueur), 4 cm (diamètre du pavillon), 1,5 cm (diamètre de l’embouchure).
Aka Konin, Guirard Gustave. Les instruments de musique de la région centre-ouest de la côte d’ivoire (Gban)