Yepes (Narciso)
Yepes Narciso (1927-1997)
Figure marquante de la guitare dans la génération qui a suivi celle d’Andres Segovia, Narciso Yepes doit une part de sa notoriété à la musique qu’il composa en 1952 pour le film de René Clément Jeux interdits. Mais le développement de sa carrière correspond au fantastique engouement d’un jeune public pour la guitare dans les années 1950 et 1960. Né à Marchena, à quelques kilomètres de Lorca, dans la province de Murcie (Espagne), le 14 novembre 1927, il découvre la guitare à l’âge de 4 ans, lorsque son père lui en achète une dans une foire. En 1933, il commence à travailler sur une vraie guitare et entre au conservatoire de Valence en 1940 pour étudier l’harmonie et la composition. Il travaille son instrument avec le pianiste Vicente Asensio à partir de 1943, ce qui lui permet de développer une technique nouvelle qui bouleverse la méthode de jeu traditionnelle de la guitare : au lieu de se limiter aux deux doigts habituels pour gratter les cordes, il emploie les cinq doigts de la main droite, comme les pianistes. A l’invitation du chef d’orchestre Ataulfo Argenta, Narciso Yepes se fixe à Madrid en 1946. C’est sous sa direction qu’il donne son premier concert public l’année suivante en jouant le Concierto de Aranjuez de Joaquin Rodrigo. Sa carrière commence à se développer et, en 1950, il part compléter sa formation à Paris avec Georges Enesco et Walter Gieseking. Deux ans plus tard, le thème qu’il a composé pour Jeux interdits est sur toutes les lèvres. Ce succès, dans une discipline sur laquelle de nombreux musiciens jettent alors un regard méprisant, le tient à l’écart du cercle très fermé des guitaristes reconnus.
Il reviendra à la musique de film en 1961 avec la partition de La Fille aux yeux d’or de Jean-Gabriel Albicocco. Mais il attendra longtemps pour être reconnu par ses pairs. Pourtant le public salue comme un véritable événement son enregistrement du Concertio de Aranjuez (1955), le premier consacré à cette œuvre. Narciso Yepes développe une importante carrière de concertiste dans le monde entier : en 1957, il effectue sa première tournée en Amérique latine ; en 1960, il fait ses débuts au Japon, en 1964 aux Etats-Unis. Pour élargir son répertoire, il se tourne vers les compositeurs contemporains qui écrivent pour lui : Maurice Ohana (Tiento, 1961 ; Concerto pour guitare, 1962) ; Federico Moreno-Torroba (Hommage à la Séguédille), Salvador Bacarisse (Concertino pour guitare, 1957), Lleonard Balada (Suite n°1, 1965 ; Concerto pour guitare, 1967 ; Sinfonia concertante pour guitare et orchestre, 1987), Ernesto Halffter (Symphonie concertante), Jean-Français (Concerto pour guitare, 1984), Leo Brouwer, Antonio Ruiz-Pipo. Il met au point en 1964 une guitare à Dix cordes, que fabriquent pour lui José Ramirez puis Ignatio Fleta et Paulino Barnabé. Plus puissante que la guitare traditionnelle à six cordes et mieux adaptée aux grandes salles de concerts modernes, elle offre, avec ses quatre cordes graves supplémentaires (do, si bémol, la bémol, sol bémol), une tessiture plus large qui donne des basses profondes aux accords et permet de reconstituer l’éventail des tessitures des instruments anciens (luth, vihuelas- sans transcription. « On peut comparer, dit-il, cette nouvelle guitare à un piano sans pédale qui brusquement en aurait acquis une. Vous voyez toutes les possibilités de jeu et l’enrichissement sonore que cela entraîne. »
En 1973, Narciso Yepes réalise, dans une double version (luth baroque et guitare), le premier enregistrement intégral de la musique pour luth de Jean-Sébastien Bach. Il a tiré de l’oubli plus de six mille pages anciennes, qu’il édite et transcrit pour la guitare moderne, enrichissant considérablement le répertoire de l’instrument. En 1989, il est élu membre de la Real Academia de Bellas Artes à Madrid. Il meurt à Calso Roig le 3 mai 1997.
Le dictionnaire des Musiques, Universalis, 2009
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