Pourquoi regarder des films d'horreur nous « glace le sang » ?
Pourquoi la peur au cinéma nous glace le sang ?
La peur vous « glace » vraiment le sang, au cinéma, comme en musique lorsque le trac ou l’émotion vous étreint.
Tandis que la musique stridente de Bernard Hermann nous hérisse, une ombre se découpe sur le rideau blanc de la douche, Janeth Leigh tend la main tandis que le couteau s’abat sur elle, du sang s’écoule dans la douche. Certaines scènes de Psychose d’Hitchcock ou d’autres films du genre comme Insidious, film d’épouvante du réalisateur James Wan « nous glacent littéralement le sang ».
Cette expression existe dans plusieurs langues, en anglais ("bloodcurdling"), en allemand ("das blut in den Adern erstarrt"). On la retrouve déjà en 1675 dans Racine, « glacer le sang dans les veines » signifie terrifier. Le verbe glacer symbolise le sang qui se gélifie par l’effroi, la peur et qui nous paralyse.
Les chercheurs ont voulu vérifier la réalité scientifique de l’expression.
Ils ont recruté pour cela 24 volontaires en bonne santé sans traitements ni antécédents particuliers âgés de moins de 30 ans. Chacun d’eux devait regarder deux films d’une durée de 90 minutes environ à une semaine d’intervalle, un documentaire récréatif sur la production du champagne et un film d’horreur, Insidious. Dix participants regardaient d’abord le film documentaire puis le film d’horreur, tandis que 14 d’entre eux visionnaient les films en sens inverse.
Des échantillons sanguins ont été prélevés chez chaque participant 5 minutes avant chaque film, et 15 minutes après. Les chercheurs ont examiné les marqueurs de l'activité de coagulation du sang.
Regarder des films qui « glacent le sang » était associé à une augmentation du niveau de facteur coagulant du sang, le facteur VIII. Après le passage du film d’horreur, ce facteur augmentait de 57 % chez les spectateurs juste après le visionnage d’Insidious, alors qu’il n’augmentait que de 14 % après le visionnage du documentaire et cela quel que soit l’ordre de vision des films.
A l’inverse le niveau de facteur VIII baissait chez 86 % des participants après la diffusion du documentaire récréatif. Mais cela sans influencer la formation de thrombine, enzyme qui joue un rôle clé dans l’activation de caillots sanguins.
Ceci indique bien que la cascade de réaction hématologique a été influencée par la peur aiguë, l’effroi, liés à la vision du film.
« Quand vous avez vraiment très peur, tous vos nerfs sont en état d’hyperexcitabilité, explique Luul Scheres, co-auteur de l'étude. L’expérience de la peur fait que votre corps se prépare à perdre du sang. »
Ce mécanisme pourrait être lié à la réponse adrénergique en relation avec la stimulation du système sympathique, mécanisme réflexe de défense vitale. Réflexe suffisant pour nous préparer à un événement menaçant qui pourrait mettre en danger notre organisme ; ainsi toute effraction cutanée liée à un combat, une agression, favoriserait la coagulation de sang et limiterait les pertes sanguines.
Si cette réaction permet de limiter la perte sanguine, elle reste néanmoins insuffisante pour entraîner la formation de caillots qui seraient par contre néfastes pour l’organisme.
Les résultats apportent une base physiologique à cette expression populaire, finalement pleine de sagesse. Et si nous pouvons sans danger aucun voir avec effroi et délectation des films d’horreur, nous pouvons certainement tout autant écouter la Sonate en fa mineur pour violon et piano, op.80 de Prokofiev. Sonate que Oïstrakh avait choisie pour lui rendre hommage à son décès et au sujet de laquelle Prokofiev lui avait confiait : « ce passage de l’Andante, où le violon fait entendre d’inquiétantes gammes rapides en sourdine sur toute son étendue, « à glacer le sang », devait sonner comme « le vent dans un cimetière ».
Chez les adultes jeunes et sains, regarder des films qui « glacent le sang » est associé à une augmentation d'un facteur de coagulation sanguine, le facteur VIII sans augmentation de facteur thrombogène.
Rédacteur. Docteur Arcier, président fondateur de Médecine des arts®
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Source
Banne Nemeth, Luuk J J Scheres, Willem M Lijfering, Frits R Rosendaal. Bloodcurdling movies and measures of coagulation: Fear Factor crossover trial. BMJ 16 december 2015
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