Noyer
Peinture
Verbe
Noyer les couleurs, c’est les mélanger sur la toile en étendant une couleur ou une teinte dans la couleur ou la teinte contiguë, jusqu’au point où elle s’y confond, et s’y perd en quelque sorte, comme on voit dans la nature le rouge des parties les plus colorées de la peau s’aller perdre, par une succession insensible de teintes, dans les parties les plus pâles. Quelques peintres, même parmi les grands coloristes, ont dédaigné cette manœuvre, et n’ont fait que placer les teintes les unes auprès des autres, sans faire sur la toile aucun mélange de couleurs.
Mais c’est, d’une part, que ce mélange avait été fait déjà plus ou moins finement sur la palette, et, d’autre part, que l’artiste comptait sur l’effet de l’interposition de la vapeur atmosphérique entre son tableau et l’œil du spectateur, pour adoucir le passage d’une touche à l’autre et donner au tout ensemble l’aspect des couleurs noyées, ce qui arrive effectivement quand la succession des teintes par touches est établie avec justesse, et que le tableau doit être vu d’une certaine distance, c’est-à-dire à travers une couche plus ou moins épaisse de cette vapeur atmosphérique.
Edouard Rouveyre Comment apprécier les croquis, esquisses, études, dessins, tableaux, aquarelles, pastels, miniatures. Librairie G. Baranger fils, 1911
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