Jeu-Parti

Le jeu-parti était un petit poème musical d’une forme très particulière, qui était en grande vogue parmi nos trouvères du moyen âge, et que ceux-ci s’en allaient chanter, aux jours de fête, dans les manoirs et dans les châteaux. M. Louis Passy a donné de ce genre de poésie la définition que voici : « Le jeu-parti prend la forme d’un dialogue : tantôt c’est une conversation poétique qui s’éteint sans conclure ; tantôt c’est un véritable tournoi littéraire à deux et même quelquefois à trois ou quatre tenants. L’un jette le gant, l’autre le relève. On s’échauffe, on lutte ; on se charge à coups de strophes ; on se perce avec des railleries ; on se frappe avec des injures. La bataille est acharnée, et il ne semble pas qu’on puisse en prévoir la fin. Tout à coup les deux adversaires s’arrêtent ; celui qui a porté le défi dépose les armes ; il nomme un juge du camp. Celui qui a relève le défi accepte ce juge, ou en désigne un autre ; rarement on en cherche un troisième. »
On trouve dans les poésies d’Adam de la Halle, l’admirable trouvère d’Arras, toute une série de jeux-partis amoureux qui sont de petits bijoux. Compositeur aussi élégant qu’il était bon poète, Adam écrivait à la fois ses vers et sa musique, et ses jolies jeux-partis ont autant de saveur que de grâce au point de vue musical qu’au point de vue poétique. Voici, comme spécimen, quelques-unes des questions qu’il posait dans ses jeux-partis :

•   1. Qu’est-ce qui est préférable : gagner la faveur de votre dame par trahison, ou la servir avec désintéressement toute votre vie, et qu’elle soit satisfaite ?
•   2. De laquelle vaut-il mieux être aimé, de celle qui n’a jamais aimé, ou de celle qui s’est détachée par raison ou par honneur,
•   3. Lequel doit plaire le plus à sa dame, celui qui fait ostentation de son amour devant tout le monde, ou celui qui se laisserait plutôt mourir que de faire voir son affection ?
•   4. J’étais parvenu à me faire aimer d’une dame qui bientôt en aima un autre. Ai-je perdu, ai-je gagné ? etc.,

Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885

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