Crispin

Un des types les plus fameux de l’ancienne comédie française, bien que Molière ne l’ait pas employé. C’est Scarron qui le premier l’a introduit sur la scène dans l’Écolier de Salamanque, comédie en vers jouée sur le théâtre du Marais en 1654. Crispin était un maître fourbe, un de ces valets rusés, sans scrupules, pleins de ressources, âpres au gain, de la race des Scapin, des Mascarille et des Gros-René. Comme eux il avait son costume spécial, et, chose assez singulière pour un comique et que nous retrouvons cependant dans Scaramouche, ce costume était entièrement noir. Un bon nombre de nos bons auteurs du second ordre ont employé le personnage de Crispin : Regnard dans le Légataire universel et les Folies amoureuses ; Dancourt dans le Chevalier à la mode ; Hauteroche dans Crispin médecin et Crispin musicien ; Champmeslé dans les Grisettes ; Le Sage dans Crispin rival de son maître ; Montfleury dans Crispin gentilhomme, etc., etc.
Une famille de comédiens célèbres a fourni à la Comédie-Française toute une dynastie de Crispins qui est restée fameuse dans les fastes du théâtre : me p ère, Raymond Poisson, qui fut, dit-on, l’inventeur et le créateur du rôle ; le fils, Paul Poisson, qui lui succéda ; et le petit-fils, François Poisson, qui continua les traditions de la race. A eux trois ils jouèrent les Crispins pendant plus d’un siècle (cent trois ans !). De Raymond Poisson un annaliste disait : « Il jouait le personnage de Crispin, qui, dit-on, était de son invention : il parlait bref, et, n’ayant pas de gras de jambes, il s’imagina de jouer en botines ; de là tous les Crispins, ses successeurs, ont bredouillé et se sont botes. L’auteur qui a fait cette remarque ajoute qu’il s’étonne qu’ils n’aient pas poussé l’extravagance jusqu’à s’aggrandir la bouche, parce que Poisson l’avait fort grande. Il était d’ailleurs bien face et d’une belle taille.
La gloire que les trois Poisson se sont acquise en jouant les Crispins a inspiré à Samson, l’un des sociétaires de la Comédie-Française, une comédie en vers qui a été représentée sur ce théâtre, il y a une quarantaine d’années : la Famille Poisson ou les Trois Crispins.

Dictionnaire pittoresque et historique du théâtre d‘Arthur Pougin, 1885

Rôle de valet qui, par ses finesses, vient en aide aux amours de son maître, ou bien qui les contre-carre par ses balourdisent et ses maladresses.
Les rôles de Crispin se retrouvent dans une foule de comédies ou de farces, entre autres dans celle qui a pour titre : Crispin rival de son maître.

Encyclopédie de l'art dramatique / par C.-M.-Edmond Béquet - 1886