Bohémienne (La)

Opéra en quatre actes et un prologue, livret de M. de Saint-Georges, musique de Balfe, représenté au Théâtre-Lyrique le 30 décembre 1870. Cet ouvrage était populaire et avait rendu célèbre le nom de Balfe en Angleterre depuis plus de vingt ans, lorsqu’on se décida à le faire connaître au public français. (Voyez dans le Dictionnaire lyrique la Bohémienne.) Les péripéties nombreuses et serrées de ce drame en décèlement l’origine ; c’était primitivement un ballet de MM. de Saint-Georges et Mazillier, la Gipsy, dont MM. Besnoist, Thomas et Marliani ont écrit la musique. Le lieu de l’action a été transporté d’Ecosse en Hongrie. Sarah d’Arnheim est une jeune fille qu’un Bohémien, nommé Trousse-Diable, a enlevée tout enfant à son père, riche seigneur hongrois. Elevée au milieu d’aventuriers, elle a inspiré une passion qu’elle partage à un jeune soldat nommé Stenio, qui s’est engagé dans la troupe de Trousse-Diable pour ne pas servir l’empereur d’Autriche. La reine des Bohémiens, Mabb, jalouse de Sarah, s’efforce de la perdre. Elle lui fait porter un bijou volé à seigneur de Crackentorp. La jeune fille est arrêtée, conduite devant le juge qui se trouve être le comte d’Arnheim. Dans son désespoir de ne pouvoir prouver son innocence, elle veut se tuer d’un coup de poignard. Le comte arrête son bras, et découvre à un signe particulier que Sarah est sa fille. Le prologue explique l’origine de cette cicatrice, dont Stenio a été l’auteur dans une circonstance où il a sauvé la vie à cette enfant. C’est une invention, à mon avis, très hasardée, et qui a l’inconvénient d’un pléonasme dramatique. Sauver trois fois la vie à une jeune fille dans un opéra, c’est deux fois de trop. Cela n’est supportable que dans un ballet. La reine Mabb, en effet, jalouse du bonheur de Srah qui va enfin épouser Stenio, rentré en grâce auprès de l’empereur et reconnu pour un noble gentilhomme, veut faire tuer la jeune fille par un de ses hommes. Trousse-Diable détourne l’arme et la balle va frapper la reine Mabb elle-même. Je passe sur la scène dans laquelle le comte veut faire épouser  à sa fille Narcisse de Crackentorp. La pièce a beaucoup plus en Angleterre et a peu réussi à Paris ; c’est la meilleure partition de Balfe. L’inspiration manque un peu d’originalité et de force, mais elle est brillante et facile. La partie vocale est bien traitée et l’instrumentation colorée. Quant à la nature des idées, elle se subordonne trop aux moyens dramatiques employés alors par Donizetti et même par Adolphe Adam. Ce dernier musicien, bien inférieur au compositeur anglais, a exercé sur lui une influence singulière, que l’on a remarquée surtout dans le Puits d’amour et dans l’Etoile de Séville. L’ouverture de la Bohémienne est fort bien écrite pour les instruments. Elle plaît aux amateurs d’une intelligence musicale moyenne. Les modulations y sont fréquentes. Je citerai de cet ouvrage le chœur des Bohémiens, la prière, dans le prologue ; dans le premier acte, la marche du guet, la romance du rêve, le duo entre Stenio et Sarah ; au deuxième acte, un bon quatuor et un duo de femmes ; ensuite, un finale imité de Donizetti, et des soli de flûte et de violon pendant les entractes. L’opéra de la Bohémienne a été chanté par Monjauze, Lutz, Bacquié, Mlle Wertheimber et Brunet-Lafleur ; dans une autre distribution, on a remarqué Coppel, Mlle Schroeder et Mme Dubois.


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