Barthés (Melchior)
Pharmacien de 1re classe, reçu à Montpellier en mai 1842 ; né à Saint-Pons (Hérault), le 11 janvier 1818. Je n’exagère rien en disant que M. Barthés a fait plus de 18,000 vers la plupart inédits : 8 contes ou historiettes, 3 satires, 12 chansons ou romances, 22 épitres, 6 descriptions ou narrations, 8 stances, 7 odes, 70 fables, 8 dialogues ; voire même deux comédies en cinq actes : le Plaideur (1841), l’Avare. Certaines de ces poésies sont tristes, d’autres gaies ; les unes sont sérieuses, les autres légères, quelques-unes burlesques.
Ei rassegat sus moun biuloun,
Quand èri triste uni coumplènto,
Quand èri fièr un rigaudoun.
Presque tout cela est en patois du midi, c’est-à-dire en ce langage imagé, riche, expressif, dont M. Barthés s’est donné la mission de recueillir les derniers vestiges, et de sauver ainsi d’un oubli néfaste le « jargon » expressif et naïf de ses pères. Sauf dix-sept pièces parues dans la Revue de Saint-Pons, et dont nous donnerons la liste à la fin de cet article, toutes les autres sont inédites.
C’est dommage, si l’on en juge par celles que nous avons pu lire. Sa chanson Bibo lou bi (vive le vin) est un petit chef-d’œuvre, et donne envie de boire :
Bibou lou bi, la joyo dal pintayre !
Se commenças à ne beoure un bricou,
May ne bebès et mens boulès bou’n trayre,
Mens bou’n trasès et may l’atroubas bou.
Ses fables sont empreintes d’une douce philosophie et d’une charmante simplicité, qualités qu’elles empruntent surtout au langage dans lequel elles sont écrites. Mais, selon nous, le morceau capital est l’Ode intitulée la Pouesio (la Poésie).
La Pouesio, aco’s un albre
Que pertout daouro sous ramèls ;
Mais l’homme frex coumo lou malbre
A lou cercà perdrio sous èls.
Aco’s une perletto fino
Que, amagado à l’escurizino,
Se douno pas à qui la bol ;
Et, tourtoureletto crentouso,
De la bouès la pus amistouso
Souben a poou, et pren lou bol.
Hurous lou que d’aquelo planto
Aymo lou perfum que nourris ;
Lou languimen jamay l’aganto,
Crento pas la dent das soucis.
Lou qui sentis pas dins soun âmo
Beluguejà certaino flammo,
Es paoure sans aquel tresor ;
Mais l’homme qu’a l’âme sansiblo,
De pensados la touto riblo,
A sa fourtuno dins lou cor.
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Que tout es gay dins la campagno !
Lou printemps, pimpo lous ramèls,
Dins la coumbo, su la montagno,
Pioulou touto raço d’aoussèls !
Cado bertas a sa nizado :
La femo porto la becado,
Lou mascle canto soun amour ;
La mayre pesso sa famillo,
Aytal foou cadun à soun tour
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En ce moment même, M. Barthés livre à la curiosité de ses compatriotes languedociens un bien intéressant ouvrage. C’est le Glossaire botanique languedocien, français, latin, de l’arrondissement de Saint-Pons (Hérault), précédé d’une étude du dialecte languedocien (Montpellier, 1873, in-8° de 265 pages). Ce travail a dû coûter des peines énormes à son auteur, puisque chaque plante y est représentée par son nom patois ou néo-romain, son nom français, son nom botanique ou latin, son nom de famille, ses propriétés, ses usages, ses produits, ses principes immédiats, l’origine du mot patois. Mais voilà bien le poète ! M. Barthés n’a pu résister à la tentation de glisser à la fin de son Glossaire une bluette en vers patois de sa composition : Uno belhado d’iber (une veillée d’hiver), ou lou printems al pé dal fioc (ou le printemps auprès du feu). Après tout, il a bien fait, puisque dans cette pièce, qui a trait à la botanique, l’auteur :
Lous pès sus caufoniès ou dins la calibado
Pla’spatat, coumo’n rei…
se fait, au beau milieu de l’hiver, un printemps à lui, en chantant le retour de la belle saison, le réveil de la nature, la pousse des pâquerettes et des violettes, le roucoulement des oiseaux, et le murmure des ruisseaux dans la prairie.
Cadoun soun goust :
En décembre as cafés, as cafés en agoust,
A b’autres la gourrino
As trabals de l’esprit bous sa bira l’esquino,
E ieu, ma paute es de rima.
(Chacun son goût :
En décembre aux cafés, aux cafés en août ;
A vous autres, la paresse
Aux travaux de l’esprit vous fait tourner le dos ;
Et moi, mon grand plaisir est de rimer).
Voici la liste des poésies de M. Barthés, insérées dans la Revue de Saint-Pons :
- 1. Lou Lion, Lou Chabal et lou Bioou, Fablo (13 mars 1859).
- 2. Epitro à Moussu Pierquin de Gembloux, inspector de l’Académio de Bourges, de l’Institut de las lengues, etc. (15 mai 1859).
- 3. Minet et Fifi. Fablo (31 juillet 1859).
- 4. Lou Raynard. Fablo (23 oct. 1859).
- 5. Louiset, ou soubeni de la Fieyro que se tenguet à Sant-Pous, lou 13 déc. 1832. Noubelo (18 déc. 1859 ; 1, 15, 29 janvier, 12, 26 février 1860).
- 6. Noué (23 décembre 1860).
- 7. Bibo lou bi. Cansou (8 février 1863)
- 8. Lous tres Cos. Fable (29 mars 1863).
- 9. L’Agasto et lou Roussignol. Fablo (17 mai 1863).
- 10. L’Ourage. Fablo (5 juillet 1863).
- 11. L’Ioou et la Pèyro. Fablo (30 août 1863).
- 12. L’Aze et lou Co. Fablo (13 mars 1864).
- 13. La Pouesio. A Moussu D…, à Labaou. Odo (10 juillet 1864).
- 14. Lou Jougayre courrigeat, ou lou lieutenant-général de Pouliço moussu d’Oumbrobal et lou Mousquetari moussu de Nesly (Ayço se passet à Paris, en 1725). – ( 18, 25 décembre 1864 ; 8 janvier 1865)
- 15. Lou Curat et lou Pecadou (11 mars 1866)
- 16. A Moussu Lucien M., de Toulouso, al sujèt de soun libre intitulat : Las Pimparèlos (13 janvier 1857).
- 17. Le Pèlerin, en vers français (19 mai 1867).
Docteur Achille Chereau. Le Parnasse médical français
Dictionnaire des médecins poètes de la France : anciens ou modernes, morts ou vivants.
Adrien Delahaye, libraire-éditeur. 1874
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