Barbier (Jean)

Ex-Maire et ex-médecin de l’hôpital civil de Fondouck (Algérie) ; officier de santé, reçu en 1821. Honneur au courage du médecin ! Dans un volume de 296 pages, et dans un poème interminable (Abrégé des crimes de 93, poème en 17 drames ; rêve politique dédié aux amis de l’ordre, de la paix et du travail ; Versailles, 1858, in-8°), il chante successivement : un Voyage dans l’immensité ; la Rencontre d’un globe inhabité ; l’Apparition de Satan ; l’Insurrection des Montagnards aux enfers ; le Tribunal révolutionnaire de Paris ; Fouquier-Tainville ; les Noyades commises dans l’église des Carmes ; les Egorgements dans les prisons ; l’Abbaye ; la Princesse de Lamballe ; les Assassinats de Lyon ; ceux de Rouen, d’Orléans, etc… Il termine par un chant sur les Rives de l’Enfer, le Pont du Styx, l’Arène infernale, le supplice et la mort de 92 et 93. – Nous détachons de ce long poème quelques vers inspirés à l’auteur par l’histoire, apocryphe, du verre de sang bu par Mlle de Sombreuil. Billaut-Varennes s’adresse à l’héroïne :

Tu montres un courage auquel je ne crois guère,
Auquel je ne croirai qu’après preuve contraire ;
Tous ces beaux sentiments qui dorent tes discours,
Applaudis autrefois, sont sifflés de nos jours.
Mais n’importe, voyons, voyons si ton courage
Est en effet réel ou s’il n’est qu’un mirage.

Le monstre, après ces mots, saisit un gobelet,
Le remplit d’un sang noir qui partout ruisselait,
S’avance en souriant, le flaire et le présente
A sa victime en pleurs, qui frémit d’épouvante.

Ce sang, lui dit Billaut, a rechauffé le corps
De tes nobles parents, que j’ai fait mettre à mort :
Voici donc le moment de prouver ton courage.
Eh bien ! Si tu consens à boire ce breuvage,
A boire d’un seul trait ce sang ! ce sang humain,
Qui commence à cailler dans ta tremblante main,
Je te rends à l’instant la liberté, ton père,
Et les riches bijoux dérobés à ta mère.
Ce sang te fait horreur, tu détournes les yeux…
Où donc est ce courage et saint et merveilleux,
Qui venait enflammer, au nom de la nature,
Et ton cœur et ta voix, et ta noble figure ?
Allons ! n’hésite pas, car tu vois que ton bras
Tremblant en fait tomber la moitié sur tes pas…
Par l’enfer ! Dépêchons ! La tasse n’est plus pleine !
Bois-le, sans le sentir, et d’une seule haleine !
Je veux bien t’accorder deux minutes encor !
Ce court délai passé, Sombreuil, ton père, est mort !
Ma montre est dans ma main, une minute passe…
L’autre la suit de près… Maintenant, plus de grâce !

Souriant de bonheur, alors notre assassin
Saisissant un stylet qu’il cachait dans son sein,
Le portait sur Sombreuil comme un vautour avide.
Alors que notre enfant lui rend son verre vide…

Docteur Achille Chereau. Le Parnasse médical français
Dictionnaire des médecins poètes de la France : anciens ou modernes, morts ou vivants.
Adrien Delahaye, libraire-éditeur. 1874


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