bal masqué (Un)

It. Un Ballo in Maschera
(Le titre complet est Amelia ou Un bal maqué.)

Opéra en trois actes (six tableaux)
Livret de Francesco Maria Piave (révisé par Somma, en 1861), d’après le livret d’Eugène Scribe écrit en 1832 pour Rossini, puis pour l’opéra d’Auber intitulé Gustave III, ou le Bal masqué.
Ce livret est fondé sur un fait historique : l’assassinat du roi de Suède Gustave III au cours d’un bal, à Stockholm, en 1782. L’action fut déplacée en Amérique au siècle précédent, par exigence de la censure romaine ; aujourd’hui, les deux versions ont cours : en Suède, au XVIIIe siècle (roi Gustave III) ; à Boston, au XVIIe siècle (comte Riccardo, gouverneur de la ville).
Musique de Giuseppe Verdi

Création
17 février 1859, à Rome (au Theatro Apollo)

Personnages

  • Riccardo, comte de Warwick (Gustave III) (ténor lyrique)
  • Renato, secrétaire et ami du comte (Anckarstroem) (baryton)
  • Amelia, sa femme (soprano dramatique)
  • Samuele (comte Ribbing), conspirateur (basse)
  • Tomaso (comte Horn), conspirateur (basse)
  • Silvano (Christian), un marin (baryton)
  • Oscar, un page (soprano léger coloratura)
  • Ulrica (Arvidson), une devineresse (alio dramatique)
  • Deux petits chœurs, ballet (dernier tableau)

Argument
Premier Acte (deux tableaux)
Riccardo (nous retenons la version « américaine ») aime Amelia, la femme de son ami Renato. Celle-ci consulte une sorcière devineresse, Ulrica, lui demandant un remède qui la délivre de son amour pour Riccardo ; Ulrica lui ordonne de cueillir nuitamment l’herbe d’oubli dans le cimetière des condamnés.

Deuxième acte (un tableau)
Amelia vient cueillir l’herbe près d’un gibet, au clair de lune ; mais Riccardo décidé à en terminer avec un amour qui le meurtrit, en envoyant Amelia et son époux à l’étranger. Un bal masqué à lieu : Amelia reconnaît Riccardo sous son déguisement, et le conjure vainement de quitter la salle. Mais, brusquement, Renato frappe Riccardo : celui-ci peut encore affirmer l’innocence d’Amelia et pardonner à ses ennemis, avant de mourir.

Le compositeur

Verdi

Verdi (Le Roncole, Parme, 1813 – Milan, 1901), de famille très humble, dut sa première éducation musicale à l’organiste de son village natal ; il échoua à l’examen d’admission au Conservatoire de Milan, mais compléta cependant sa formation auprès d’un professeur privé, pendant trois ans. En 1939, son premier opéra, Oberto, est représenté avec succès à la Scala ; on lui signe aussitôt un contrat pour trois autres ouvrages : l’opéra bouffe Un Giorno du Regno (Un jour de règne, 1840) est un échec, mais Nabucco est accueilli triomphalement ; cet opéra et les deux suivants ) I Lombardi (1843) et Ernani (1844) ) étendent la réputation de Verdi à toute l’Europe, et l’esprit patriotique dans lequel sont traités les sujets fait bientôt du compositeur un porte-drapeau du Risorgimento italien. Ce sont cependant ses « années de galère » : malgré les succès d’Attila (1846), de Macbeth (1847) et de Luisa Miller (1849), Verdi s’intéresse plus à la politique qu’à son métier. Mais, en 1851, La Traviata (la même année – cette dernière en dépit d’un échec retentissant -, puis les Vêpres siciliennes (1855) et Simon Boccanegra (1857) manifestent la maturité de son génie dramatique.
En 1859, Verdi s’enthousiasme pour l’action de Garibaldi : en 1865, il fera partie du premier Parlement italien. Ces événements ralentissent son activité créatrice (jusqu’en 1857, le musicien avait fait représenter un ou deux opéras chaque année). Seulement six opéras nouveaux verront le jour dans les quarante dernières années de sa vie ; mais ce sont des œuvres considérables : Un Ballo in Maschera (Un bal masqué, 1859), La Forza del Destino (la Force du destin, 1862), Don Carlo (1867), Aïda (1871), Otello (1887), Falstaff enfin (1893).
Ces deux derniers ouvrages représentent l’apogée du drame lyrique et de l’opéra bouffe italiens. Après le premier chef-d’œuvre que fut Nabucco, la qualité des opéras de Verdi a généralement décliné, puis sa production) à partir de Rigoletto ) - a suivi une courbe remarquable ascendante ; cette production comporte, au total, vingt-six opéras ) sans compter les différents versions de certains d’entre eux -, un magnifique Requiem, trois Pièces sacrées, un quatuor à cordes et des mélodies.

L’œuvre
Un bal masqué présente toutes les qualités des Vêpres siciliennes (voir cet œuvre), sans en accuser les défauts : alors que, dans les Vêpres, le disparate et l’enflure du « grand opéra » meyerbeerien se faisaient cruellement sentir, le miracle ici s’accomplit d’une unité de styles. Il semble qu’avec Un bal masqué Verdi résume toutes les tendances passées de sa carrière : on y rencontre le sentiment patriotique, mais aussi la peinture d’une passion amoureuse ; le fantastique est présent dans les incantations magiques d’Ulrica (qui est sœur de l’Azucena du Trouvère), mais également le romantisme morbide de l’extraordinaire scène du gibet ; enfin, apparaît l’évocation émue d’un sentiment nouveau – encore inconnu dans le théâtre de Verdi (et qui trouvera son expression la plus noble dans Don Carlo) -, celui de l’amitié.
D’où l’extrême diversité d’une partition qui superpose les « tons » avec une concision et une maîtrise peu communes : on soulignera ici les progrès accomplis par Verdi dans l’art de composer ses « tableaux » et d’aménager les transitions entre les différents morceaux qui les constituent ; art des « structures intermédiaires » (récitatifs, interludes orchestraux), art du développement thématique par modulations et contrepoints, qui approfondit le sens des situations dramatiques. Significatifs de ces nouveaux progrès sont les deux tableaux du premier acte, d’une écriture rapide, incisive, et d’une légèreté de touche qui n’était apparue dans aucun ouvrage antérieur. Notons aussi l’apparition d’une sorte d’humour musical : quintette du second tableau, qui impose au ténor le difficile exercice de mêler le rire au chant : Également, scène finale de l’acte du gibet (trio de Renato et des conspirateurs), dont le ton d’ironie évoque déjà celui de Fastaff. Admirons, enfin, la grâce désinvolte du personnage du page Oscar, l’une des créations les plus originales du compositeur.
Mais un bal masqué est, surtout, l’opéra d’une grande passion contrariée, et peu de pages verdiennes dépassent le lyrisme du deuxième acte : grand air d’Amelia (« Ma dall’arido stelo divulsa », puis son duo avec Riccardo, duo d’amour d’une profonde émotion qui préfigure certainement celui d’Otello (v. cette œuvre)…
Nul doute qu’avec Un bal masqué, qui combine admirablement les atmosphères étranges, les scènes de faste brillant, les épisodes romantiques et les effusions du sentiment, Verdi n’ait réalisé son opéra le moins « conventionnel » - peut-être dramatiquement le plus complet -, et qui se hausse au niveau des tout derniers chefs-d’œuvre.

Discographie
Six enregistrements intégraux disponibles ; quatre s’imposent.
H. Nelli (Amelia), J. Peerce (Riccardo), R. Merrill (Renato), C. Turner (Ulrica), et., Orchestre symphonique, NBC, dir ? A. Toscanini (3 disques mono, réed, RCA) : des solistes simplement corrects (excepté R. Merrill), mais la direction enthousiasmante de Toscanini.
M. Callas (Amelia), G. Stefano (Riccardo), T. Gobbi (Renato), F. Barbieri (Ulrica), etc., Orchestre Scala de Milan, dir. A. Votto (3 disques mono, rééd., Voix de son maître) : une interprétation vocale exemplaire (l’Amélia de M. Callas demeure inapprochée).
M. Arroyo (Amelia), P. Domingo (Riccardo), P. Cappuccilli (Renato), F. Cossoto (Ulrica), Orch. New Philharmonia, dir. R. Muti (3 disques, EMI-Voix de son maître) : version homogène, magnifiée par un chef d’exception.
L. Price (Amelia), C. Bergonzi (Riccardo), R. Merril (Renato), S. Verret (Ulrica), etc., Orch. RCA italienne, dir. E. Leinsdorf (3 disques, RCA) : L. Price (qui s’égale presque à M. Callas) et C. Begonzi, mais une direction d’orchestre un peu inégale.
Enfin, deux enregistrements « live » sont à mentionner : l’un avec Z. Milanov et R. Tucker, dir Stefano et, surtout, E. Bastianini en Renato, Orch. Scala de Milan, dir. G. Gavazzeni (3 disques mono, Cetra).


Médecine des Arts®    
  715 chemin du quart 82000 F-Montauban
  Tél. 05 63 20 08 09 Fax. 05 63 91 28 11
  E-mail : mda@medecine-des-arts.com
  site web : www.medecine-des-arts.com

Imprimer

Association

Faire un don
Adhérer

Formation Médecine des arts-musique

Cursus Médecine des arts-musique