Revue Médecine des arts N°74

L’amusie congénitale est une difficulté hautement spécifique à développer une compétence musicale normale. Ce trouble est indépendant d’un déficit de l’audition, du langage ou de la cognition. Il résulte d’un déficit neurologique du processus de discrimination fine des hauteurs, ne permettant pas le traitement correct des intervalles de hauteur inférieurs au demi-ton.

Environ 4 % de la population seraient atteints d’amusie congénitale. Ce sont des personnes pour qui l’écoute de la musique n’est pas toujours un plaisir, elle peut même être très désagréable. Chanter juste s’avère être une véritable épreuve, l’apprentissage musical est compliqué. La musique peut rester totalement inintelligible pour ceux qui tenteraient de la comprendre.

Les diverses études scientifiques, dominées par les travaux de la neuropsychologue Isabelle Peretz et de son équipe à Montréal, ont permis de localiser en partie les zones cérébrales défectueuses. Il existe chez les amusiques une baisse d’activité des connexions neuronales au niveau du gyrus frontal droit inférieur et du cortex auditif droit, l’IRM mettant en évidence une hyperdensité de la substance grise à ce niveau. Cela résulterait d’une anomalie de la migration neuronale ou d’un élagage atypique des cellules nerveuses pendant leur développement. L’origine génétique de l’amusie congénitale semble acquise mais les travaux de recherche tentent encore de mettre en évidence le gène responsable.

La connaissance du concept d’amusie congénitale semble indispensable pour tout professeur de musique afin de comprendre les difficultés d’apprentissage de la musique de la part de certains élèves et de les orienter pour un diagnostic. Méconnaître ce déficit serait risquer d’exclure sans explication des élèves du milieu musical. De plus, sa connaissance aide à mieux appréhender le fonctionnement cérébral de la cognition musicale.
Guenaëlle Mesthé

Mots clés : Amusie congénitale, Hauteur sonore, Neuropsychologie, Musique,

Un questionnaire adressé à des harpistes européens a permis de collecter des données relatives à leur pratique et à leur expérimentation de la douleur. Leurs conditions de pratique, le type de harpe jouée, la hauteur de l'instrument, le répertoire, l'assise, le type de cordage, entre autres, sont des caractéristiques prises en considération. D'après les réponses obtenues, 74 % des harpistes rapportent des douleurs liées à leur pratique. Les solutions recherchées dans ce cas sont très diverses, souvent personnelles (respiration, détente, auto-massage, etc.), ce qui confirme que les harpistes n'ont pas appris, lors de leur apprentissage musical ou par leur environnement professionnel, auprès de quels professionnels rechercher de l'aide en cas de douleurs ou de problèmes physiques. Des moyens de prévenir ou de réduire les douleurs chez les harpistes existent : placement corporel physiologique, ergonomie de l'environnement instrumental (assise, accordage, transport, etc.), entraînement proprioceptif et physique.
Roxane Martin

Mots clés : Harpe classique, Harpe celtique, Harpiste, Douleur, Posture, Prévention,

Il n’est pas rare que des chanteuses, pourtant jeunes et toniques, présentent une instabilité vocale ou souffrent d’incontinence urinaire lorsqu’elles recommencent à chanter après la naissance d’un enfant. Étant donnée l’importante pression intra-abdominale que nécessitent l’appui et le soutien du souffle dans la pratique du chant classique, un soin tout particulier doit être apporté à la rééducation post-natale des chanteuses afin de leur éviter ces déboires. Des exercices spécifiques permettant au périnée et aux muscles abdominaux de retrouver la force de gérer la pression intra-abdominale sont proposés.
Marie Hutois

Mots clés : Chant, Chanteuse, Post-partum, Périnée, Muscles abdominaux, Rééducation,

Ces travaux de recherche visent à établir un lien entre les manifestations de douleurs chez les musiciens et les voyages, d’une part, et la préparation physique préventive, d’autre part. Le questionnaire Médecine des Arts®, élaboré pour l’étude des troubles musculo-squelettiques spécifiques des musiciens, a été appliqué simultanément sur deux échantillons différents de musiciens et par l’intermédiaire de deux moyens différents – en ligne et en version papier.

Plus de 90 % des musiciens ayant répondu dans chacune des deux études déclarent avoir éprouvé des douleurs lors des douze derniers mois. L’analyse des résultats a permis d’établir deux corrélations statistiquement significatives. L’intensification des déplacements influence la prolongation des arrêts de la pratique instrumentale en raison des douleurs. Il s’avère aussi que les musiciens ayant suivi un cours de préparation physique sont plus rares à signaler des suspensions forcées de l’activité artistique. De plus les auteurs observent une tendance selon laquelle la pratique d'un sport pourrait diminuer la survenue de douleurs ainsi que les ruptures de continuité de la pratique instrumentale dont elles sont la cause.
Jadwiga Smieszchalska, Mathieu Spencer

Mots clés : Musicien, Questionnaire MDA, Voyage, Préparation physique préventive, Pratique instrumentale, Douleur, Enquête web,

C’est grâce à l’union de la musique et de la médecine que les auteurs, issus de ces deux disciplines, sont parvenus à la surprenante vérité. A l’issue d’une recherche méthodique, approfondie et critique, l’obscur brouillard quasi légendaire qui a entouré le décès de Wolfgang Amadeus Mozart depuis plus de deux siècles s’est brusquement dissipé. Le divin Mozart s’est soustrait à la vie de ses semblables, de ses proches tant chéris comme de ses admirateurs, en quelques semaines, à 35 ans… à cause d’une potion stimulante, magique d’abord, puis consommée avec excès ensuite, dont la toxicité perverse — qui lui était bien sûr inconnue et insoupçonnable — est devenue rapidement mortifère.

Les diagnostics les plus saugrenus, les plus inattendus, insolites et imaginaires, ont nourri la légende du trépas du compositeur, alors qu’il a été l’acteur — bien involontaire — de sa rencontre avec la camarde. Au sommet de son talent, Mozart est bien mort empoisonné, comme il l’avait subodoré… mais par lui-même, et après avoir mis son génie et sa détresse dans de magnifiques et bouleversantes notes de musique. Les supputations, les pressentiments ont émergé, se sont distingués, parfois juxtaposés, sans aucune certitude ni cohérence. L’époque des découvertes médicales modernes, scientifiquement établies — surtout depuis le milieu du xixe siècle — a fini par arriver… mais trop tard pour Wolfgang ! Et ces découvertes nous permettent maintenant de développer, d’affiner et d’affirmer des certitudes, avec la clarté et la rigueur scientifique qui sied à l’homme attentif et scrupuleux du xxie siècle, assujetti à « l’exacte vérité », sur l’agonie et l’effondrement jusqu’au trépas de ce virtuose d’exception qui ne cesse de nous émouvoir et de nous enchanter et qui va nous accompagner encore longtemps.
Michèle Lhopiteau-Dorfeuille, François-Régis Cerruti

Mots clés : Mozart, Mort, Mercure, Hydrargyrisme, Néphropathie aiguë, Liqueur de Van Swieten,

Trac, stress, anxiété de performance sont très répandus chez les musiciens et de nombreuses études se sont intéressées au trac lors de la performance musicale. Ce concept d’anxiété de performance, qui a aussi été largement étudié dans le monde du sport, a conduit l'auteur à s'intéresser aux émotions dans un sens beaucoup plus large. Cette étude a pour but d’analyser et d'identifier les émotions avant et pendant la situation de concours d’orchestre, afin de mettre en évidence les éléments situationnels et personnels susceptibles d’interférer sur les états affectifs, ainsi que sur la performance musicale.
L'échantillon de 24 musiciens comprend 12 musiciens qui ont réussi des concours d’orchestre et sont actuellement en poste et 12 musiciens qui n'ont encore jamais gagné de concours d’orchestre. Les résultats montrent une nette différence de leurs états affectifs avant et pendant le concours, une différence dans la planification et la gestion mentale du concours, ainsi que dans l’utilisation des éléments liés au contexte environnemental.
En conclusion, l’étude de la contribution des émotions sur la performance musicale lors de concours d’orchestre semble constituer une perspective de recherche intéressante, notamment afin de développer des moyens d’amélioration de la préparation à des situations de concours grâce à une meilleure planification et une préparation mentale adaptée.
Roberta Antonini Philippe

Mots clés : Musicien, Concours d’orchestre, Entretien semi-directif, Etat affectif, Stratégie mentale, Stratégie de planification, Anxiété de performance,